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Balda: Centre Stratégique au Sein du Lamidat De Bogo

Cite this article as: Mamoudou M. A. & Oumarou Y. H. (2025). Balda: Centre Stratégique au Sein du Lamidat De Bogo. Zamfara International Journal of Humanities, 3(1), 87-100. www.doi.org/10.36349/zamijoh.2025.v03i01.010.

BALDA: CENTRE STRATÉGIQUE AU SEIN DU LAMIDAT DE BOGO

Mouhamadou Aminou Mamoudou

Yasminatou Hamadou Oumarou

Université de Maroua, Département des Sciences Historiques Archéologiques et du Patrimoine, Maroua, Cameroun

Abstract: Le sujet porte sur « Balda, un centre stratégique au sein du lamidat de Bogo », un thème clé pour comprendre l'histoire politique et sociale du lamidat de Bogo. Balda, est un village ou localité dont les origines remontent à des périodes historiques anciennes de l’histoire du Cameroun. Il a joué un rôle central dans le peuplement de la région et dans les dynamiques de pouvoir au sein du lamidat de Bogo. En effet, il est question dans ce travail de comprendre les facteurs qui ont conduit Balda à devenir un enjeu stratégique, tant sur le plan politique qu'économique du lamidat de Bogo. La problématique qu’explore cet axe de recherche est celle de savoir comment Balda a été une sphère d'influence dans la conquête du trône de Bogo et en quoi cette localité est devenue une terre d'accueil privilégiée pour des figures marquantes comme Modibbo Hayatou? Les objectifs de l'étude sont de retracer l'histoire de Balda, d'analyser son rôle stratégique dans la lutte pour le pouvoir à Bogo, et d'évaluer l'impact de l'arrivée de Modibbo Hayatou sur son développement. Les hypothèses posent que Balda doit sa position stratégique à des facteurs politiques, économiques et géographiques qui ont influencé le cours de l’histoire et des évènements. L'approche méthodologique se base sur la démarche historique et analytique, reposant sur des sources documentaires et des témoignages locaux.

Most Clés: Lawanat, stratégique, peuplement, influence, lamidat

Introduction:

Balda, une localité emblématique du lamidat de Bogo, occupe une place prééminente dans l’histoire du Nord-Cameroun, tant sur le plan stratégique que symbolique. En tant que lawanat, Balda a joué un rôle déterminant dans le peuplement de la région et dans les dynamiques politiques qui ont façonné le lamidat[1] de Bogo. La localité de Balda dépasse le simple cadre géographique ; elle est devenue un carrefour stratégique dans les luttes du pouvoir[2] et un centre d’échanges économiques essentiels de la région. La question centrale de cette étude concerne la manière dont Balda a émergé comme un point stratégique[3] dans la conquête du trône de Bogo.

Le problème que soulève ce sujet de recherche ou article réside dans la compréhension des facteurs qui ont contribué à ce statut de sphère stratégique. La problématique explore les mécanismes par lesquels Balda a acquis une telle importance dans le jeu politique et comment elle est devenue un refuge prisé pour des figures influentes comme Modibbo Hayatou. Ce travail évoque trois objectifs dont il convient d’énumérer. Premièrement, il s’agit de rappeler l’historique de Balda en mettant l’accent sur sa genèse et son éution ; deuxièmement, d’analyser le rôle que Balda a joué dans la conquête du trône de Bogo et troisièmement, de cerner les effets de l’installation du petit-fils de Dan Fodio en la personne de Modibbo Hayatou sur l’émancipation ainsi que l’expansion de cette entité sociopolitique qui est Balda. Selon les hypothèses, l’atout stratégique qui fait la fierté de Balda est dû grâce à la combinaison de plusieurs facteurs qui sont entre autre géographiques, politiques et économiques. Dans un but de connaître profondément l’historique de cette entité sociopolitique, l’approche méthodologique utilisée dans ce travail est d’une part historique et d’autre part analytique. Cette approche vise à effectuer une enquête minutieuse des sources écrites et orales obtenues à Balda et au sein du lamidat de Bogo sans oublier également le lawanat de Madaka et Ouro-Messéré. En examinant, ces données, il ressort que cette étude permet d’appréhender que Balda a une histoire très riche dont il faut toujours saisir pour comprendre les enjeux du pouvoir à Bogo.

1. ORIGINE ET HISTORIQUE DE PEUPLEMENT DE BALDA

Dans cette partie, il convient d’énumérer la genèse du lawanat de Balda et son historique de peuplement.

1.1. Origne

Balda est une localité située dans la région de l’Extrême-Nord, département du Diamaré et arrondissement de Bogo. C’est une entité politique qui englobe plus de 2100 personnes en 2010[4]. Cette entité politique peule possède une histoire très important faisant même le rayonnement de Balda sur tous les autres lawanats subalterne du lamidat de Bogo. L’origine du nom Balda remonte dans un loin passé. Son histoire est très complémentaire à celle du lamidat de Bogo. L’histoire du lawanat de Balda se confond avec celle du lamidat de Bogo. Désignés par le nom de Baldanko’en, ils se dénommaient eux-mêmes Mala ou Malda. Mais ce nom a été transformé par les Peuls dès leur arrivée en Balda (Eldridge Mohammadou, 1988:136-156). C’est dans cette même vision que l’hypothèse recueillie auprès d’Adama Dahirou[5], Balda aurait pris son nom du peuple Baldanko’en qui étaient un mélange de Guiziga et de Zoumaya. Donc, Balda signifie « lieu où habitait les peuples Baldanko’en ».

Eldridge Mohammadou fournit une analyse détaillée de ces origines. Selon cet auteur, Balda naquit de la confluence de plusieurs vagues migratoires qui ont marqué le paysage de cette partie du Cameroun. Il explique que, dès les premiers siècles de notre ère, la région de Balda a attiré des groupes nomades et sédentaires en raison de sa position géographique stratégique, située entre les routes commerciales et les ressources naturelles essentielles. Mohammadou met en avant que cette position a facilité les échanges économiques et culturels, contribuant à la formation d'un centre dynamique qui a progressivement acquis une importance régionale. Il décrit comment les migrations des Peuls et des autres groupes ethniques ont modelé le développement de Balda, en favorisant la création d'une communauté interethnique soudée par des liens commerciaux et politiques (Mohammadou, 1988) Ce processus de formation a été marqué par des alliances et des conflits, ce qui a renforcé la position de Balda en tant que centre de pouvoir local et régional. Balda a plusieurs ethnies qui ont contribué à son rayonnement.

1.2. Historique du peuplement

Le peuplement de Balda est marqué par l’interaction complexe entre les peuples autochtones et les migrations successives. Les Baldanko’en, premiers habitants de la région, constituent le noyau historique autour duquel la communauté de Balda s’est formée. Les Baldanko’en sont les descendants des premiers groupes qui se sont installés dans la région en raison de sa position stratégique et fertile. Les sources orales racontent que les Baldanko’en en se sont établis à Balda en raison de la disponibilité des ressources naturelles, notamment les terres agricoles et les points d'eau, qui étaient essentiels à leur subsistance. À cet effet, les Baldanko’en ont bâti leur cité autour des clans et des pratiques endogènes et ce qui a jeté les soubassements d’une organisation sociale fiable et stable pour eux. Ils s’adonnaient constamment à l’agriculture et à l’élevage qui ont l’atout important pour leur économie. Leur implication dans ces activités leur ont permis de prospérer sur toute l’étendue de Bogo[6].

L’avènement des Peuls dans la localité de Balda a été perçu comme une phase important de l’histoire de peuplement de cette structure politique. La migration peule au Nord-Cameroun ayant début au XVIIIe siècle a permis à ces derniers de s’installer également à Balda. Pour maintenir leur position à Balda et s’imposer au sein des autochtones qui sont les Baldanko’en, les Peuls, ont tissé des alliances matrimoniales, les échanges commerciaux mais aussi culturels. Cette interaction a permis à la cohabitation pacifique entre les Peuls et les Baldanko’en[7].Les Peuls ont introduit des pratiques nouvelles en matière de gestion du bétail et ont enrichi le patrimoine culturel local par leurs traditions et leur mode de vie. La fusion de deux groupes a contribué à façonner la dynamique sociale et économique de Balda, transformant la localité en un centre de diversité ethnique et culturelle. Cette cohabitation a non seulement renforcé le rôle stratégique de Balda dans la région mais a également favorisé une riche mosaïque culturelle, marquée par la complémentarité entre les Baldanko’en en et les Peuls[8].

Comme le souligne l’historien camerounais, Alain Foka: « Nul n’a le droit d’effacer une page de l’histoire d’un peuple car un peuple sans histoire est un monde sans âme »[9]. Ainsi, les premiers habitants de Balda furent les Baldanko’en qui est un peuple ayant des similitudes avec les Guiziga et les Zoumaya. Cette entité sociopolitique peule s’observe sur la photo ci-dessous.

Photo 1: Le lawanat de Balda

Cliché: Yasminatou Hamadou Oumarou, Balda, le 1er juin 2019

Cette photo présente une vue de face du lawanat actuel de Balda, situé dans le quartier Gare, qui abrite le siège de ce lawanat. Ce palais est construit en briques et doté de portes rouges. Devant l'édifice, un drapeau camerounais est érigé. Sur la droite, un hangar est visible, servant de lieu de repos pour le lawan, tandis qu'à gauche, un petit mur de protection entoure partiellement la structure. À l'intérieur, on peut observer, de gauche à droite, les « Nimiers[10] ». En arrière-plan, se dresse majestueusement une montagne, qui ajoute une dimension imposante à la scène, soulignant l'importance géographique et symbolique de cette chefferie. La montagne, en tant qu'élément naturel, semble protéger et dominer le territoire, renforçant l'autorité traditionnelle incarnée par le lawanat, tout en évoquant la permanence et la stabilité du pouvoir local. Ainsi, la mosaïque de peuples que foisonne Balda a fait de lui un centre stratégique pour la conquête du trône de Bogo

2. BALDA: UN ENJEU STRATÉGIQUE DE LA CONQUÊTE DU TRÔNE DU LAMIDAT DE BOGO

Le lawanat de Balda occupe une place centrale dans le pouvoir du lamidat de Bogo. Ainsi, tout prince[11] souhaitant accéder au titre de lamido doit devrait nécessairement s’intéresser à cette zone stratégique. Divers aspects en font un enjeu majeur.

2.1. Rôle politique

Balda est un lawanat qui compte plus de 16 djaouro, selon un arrêté préfectoral. Tous ces djaouro sont placés sous l'autorité du lawan Dahirou Mouhammadou depuis son accession au trône[12]. Ce lawanat comprend les quartiers suivants: Balda-Gare, Kourdaya, Ouro-Dolé, Bogore-Ardo Haman, Maïdjibé, Ouro-Zanga, Ouro-Yayres, Ouro-Bame, Tsakawo, Kagawo, Soulkandou, Danki I, Danki II, Yamdji-Djimre, Blama Tokoré, Yamdji-Djimre-Mousgoum, Woïla-Hosseré, Balda-Massa, Goulof, et Ouro-Hardé.[13]

Avant de souligner l'importance de Balda, il est pertinent de s'attarder sur le commandement central auquel le lawanat de Balda est soumis. En effet, Balda est subordonné au lamidat de Bogo, fondé par les Peuls entre le XVIIIe et le XIXe siècle. Comme nous l'avons mentionné, Bogo a d'abord été un royaume, puis un arrondissement, et est aujourd'hui une Collectivité Territoriale Décentralisée (CTD), ou un mélange de ces trois statuts. Bogo est, depuis environ 200 ans, reconnu comme l'une des principales forteresses peules du pays (Seignobos, 2000 cité par Charara, 2011: 129). Bogo se situe à la limite de l'aire culturelle soudanaise, étant en fait le dernier "bastion" peul à l'est. Au-delà du cordon dunaire, on entre dans une zone d'identité culturelle mousgoum (Charara, 2011: 131).

Ainsi, Balda est un lawanat sous la dépendance du lamidat de Bogo depuis sa création, vers 1747, par Oudjiri[14], un Peul migrant venu du Mali. Cela montre pourquoi ce lieu est une sphère stratégique. Depuis la fondation de ce lawanat, son système s'observe sous deux aspects principaux: politique et économique. Sur le plan politique, Balda est considéré comme le deuxième centre de commandement après le lamidat de Bogo. La majorité des lamibe de Bogo ont été des lawan de cette sphère politique et des princes de premier plan. Chaque lamido qui accédait au trône de Bogo installe son fils ou son frère à la tête de ce commandement de Balda. En 1970, le lamido Mouhammadou Oussoumanou a intronisé son fils, le prince Dahirou, à la tête de ce lawanat. Selon les sources archivistiques[15] recueillies:

- Article 1er stipule que: « Est homologuée la désignation faite selon les règles coutumières de Monsieur Dahirou Mouhammadou en qualité de lawan de Balda, arrondissement de Bogo, département du Diamaré, en remplacement de Monsieur Yerima Bouba, destitué ».

- Article 2: « Monsieur Dahirou Mouhammadou percevra à ce titre, annuellement par douzième payé mensuellement et à terme échu, la ration servie à son prédécesseur, imputable sur le budget du Cameroun Oriental, Chapitre 03 ».

De plus, la majorité des princes de Bogo ont un dicton permanent qui dit: « Tout prince qui accède au trône de Balda a plus de fortes chances de gouverner un jour Bogo ». Cette croyance était profondément ancrée dans l'esprit de tous les princes de Bogo, ce qui explique l'importance politique accordée à cette zone. Ainsi, tout lamido prépare sa succession à partir de ce lawanat en intronisant son favoris qui peut etre son frère ou son fils à la de ce lawanat.

« En tout état de cause, et pour régulariser la situation de ces lawanats pour le bon fonctionnement du service, je rappelle que le lamido avait destitué Yerima Bouba dans l'intention de placer son fils Yerima Dahirou à la tête de cet important lawanat de Balda. Les relations entre l'administration et le lamido de Bogo ayant beaucoup éué ces deux dernières années, je pense que nous pouvons confier Balda à Yerima Dahirou et surveiller son comportement »[16].

Ces différents arguments convergent avec ceux de Yerima Dahirou, qui est le lawan de Balda depuis 1970, jusqu'à aujourd'hui. Selon ce dernier:

« Balda est un lawanat très important à nos yeux, nous, les princes de Bogo. Et son attrait ne cesse de croitre chaque jour. Ce lawanat a toujours été géré par notre lignée. La preuve en est que les cinq générations qui ont dirigé Balda sont mes parents, grands-parents et aïeux. Parmi eux, il y a Gare, Oussoumanou Gare, Mouhammadou Oussoumanou, Bouba Oussoumanou, et moi-même, Dahirou Mouhammadou ». Cela montre l'importance accordée à ce lawanat.[17] 

Dans ses travaux, Eldridge Mohammadou a montré que la gestion du lawanat de Balda a toujours été une affaire de famille. Lors de son départ en 1894, le lawan Bakari confie le commandement de Balda à Waziri Alioum, l'un de ses notables (Eldridge Mohammadou, 1988:156). En 1908, Waziri Alioum, préférant obéir directement au lamido Soudi plutôt que de dépendre d'un vassal de ce même lamido, quitte Balda pour Fadaré. Le lamido Bakari confie alors ce territoire à son frère cadet, Oussoumanou. Mais en 1925, Oussoumanou est appelé à assumer les fonctions de lamido de Bogo. Il choisit donc son neveu, fils de Babba, pour le remplacer à Balda. En 1931, Malloum est muté et nommé lawan de Guinglay, tandis que Balda est confié au fils ainé du lamido Oussoumanou, Mouhammadou. Toute personne qui aspire à devenir lamido de Bogo devrait commencer par Balda, sans quoi cela serait difficile. Depuis des générations, Balda a vu éuer de nombreux lawan qui ont fini par être intronisé comme lamibé à Bogo, ce qui explique l'importance de ce lawanat. Sa politique est la plus influente de tous les lawanats du lamidat de Bogo. De plus, Balda est un lawanat, qui regorge des savoirs ayant abrité de nombreux savants religieux tels que Modibbo Hayatou, Modibbo Ahmadou, Modibbo Oussoumanou, Modibbo Bello et Modibbo Oumara[18].

Ainsi, en combinant les sources orales, écrites, et archivistiques, il est clair que le lawanat de Balda est un centre de commandement crucial pour tout prince désirant accéder au trône du lamidat de Bogo. La preuve en est que plus de 70% des lawan ayant dirigé Balda ont accédé au trône du lamidat de Bogo. Si Balda est considéré comme une zone stratégique importante sur le plan politique, il est également essentiel de souligner son role économique, qui est la base de son rayonnement.

2.2. Rôle économique

Balda possède une économie très dynamique ce qui explique également un atout important que ce lawanat possède au sein du lamidat de Bogo. L’agriculture et l’élevage sont le pilier essentiel de son économie. La présence de l’eau en permanence est un moyen idéal qui permet la prospérité de plusieurs culturels (mil, arachide, maïs, niébé…)[19]. En outre, Balda parfois défie l'autorité du lamidat de Bogo pour gérer son économie florissante. Par exemple, Yerima Bouba Oussoumanou a résisté aux ordres de son frère, le lamido de Bogo, Mouhammadou Oussoumanou. Il est mentionné que l'impôt de Balda n’était pas entièrement payé à temps, contrairement aux autres villages.[20]

Balda est un centre économique clé du lamidat de Bogo, en particulier pour ses cultures comme le coton, le niébé et le mil. Lorsque les récoltes de ces produits chutent, l'économie de Bogo en souffre également. La culture du mil est particulièrement importante pour Balda, avec des rendements élevés et une grande partie de la production étant exportée vers Bogo. Les habitants de Balda sont parmi les principaux producteurs de mil dans la région, fournissant une part significative au marché de Bogo[21]. L'élevage est également crucial pour l'économie de Balda[22]. Chez les Peuls, l'élevage est une source majeure de richesse. A Balda, les Peuls possèdent de nombreux troupeaux, ce qui contribue à des prix compétitifs pour la viande et le lait. La transhumance, le déplacement des troupeaux vers les Yayres, est une pratique courante, bien que certains troupeaux se dirigent désormais vers d'autres zones comme Balaza-lamido et Malam-Petel.

En résumé, Balda est une zone stratégique à la fois politiquement et économiquement. Son importance politique est démontrée par le fait que de nombreux lamibe de Bogo ont d'abord été lawan à Balda. Économiquement, Balda est l'un des principaux centres de production de mil et d'élevage dans le lamidat de Bogo. En plus de son rôle politique et économique, Balda a aussi attiré des figures religieuses importantes, comme Modibbo Hayatou.

3. BALDA: TERRE D’ACCUEIL DE MODIBBO HAYATOU

Lawanat fier de son histoire et symbole de conquête du trône de Bogo, le lawanat de Balda est également connu pour son hospitalité et sa générosité envers Modibbo Hayatou. Avant de discuter des raisons de son installation, du rayonnement de Balda lors de son arrivée et de l'impact de son influence sur les lamidats de Bogo, Maroua, Mindif et Yola, il est important de se pencher sur la personne de Modibbo Hayatou.

Né à Sokoto vers 1840, Modibbo Hayatou a été éduqué par son père Said, un homme respecté pour sa sagesse et sa piété. Comme beaucoup de jeunes hommes brillants de son époque, Hayatou participait aux séminaires et aux récitations pour promouvoir l'apprentissage à Sokoto. Après la mort d'Abubakar, son père Said a perdu l'élection en faveur de son frère Mazu, ce qui a déçu Hayatou. Il a alors cherché à augmenter ses propres chances de succéder au trône de Sokoto à distance. Décidant de quitter Sokoto, il a cherché fortune ailleurs pour reconquérir le trône. Il est ainsi arrivé à Adamawa en 1878 avec trente-trois étudiants et assistants sous le règne du lamido Sanda (Eldridge Mohammadou, 1976 ;

Njeuma, 1978). L'installation de Modibbo Hayatou à Maroua fut brève, car le lamido Sali l'a encouragé à se rendre sur les terres de Bogo, plus précisément à Balda (Eldridge Mohammadou, 1988: 142). Le lawan Gare, qui n'avait pas le choix et n'avait pas été consulté, a dû accepter de l'héberger. La principale motivation de cet accueil était que Modibbo Hayatou était un descendant du Sehou. Après cette brève présentation de Modibbo Hayatou, Il est essentiel d'examiner les facteurs politiques, économiques[23] et religieux qui ont motivé son choix de s'installer à Balda.

3.1. Facteur politique

Les Peuls sont réputés pour leur habileté en politique, utilisant souvent la stratégie « diviser pour mieux régner »[24]. Cette compétence est particulièrement visible dans le clan Férobé, connu pour ses talents diplomatiques. Pour pacifier Maroua, les Peuls ont monté le chef Bi-babarang contre ses frères guiziga afin d'accéder au trône (Eldridge Mohammadou, 1976). Modibbo Hayatou a appliqué une stratégie similaire à Balda pour obtenir le pouvoir. A cette époque, Bogo traversait une crise de succession entre les princes Gare et Bakari, qui luttaient pour le commandement. Après une confrontation violente en 1890, le prince Bakari perdant se réfugia à Balda. Hayatou fit alors la connaissance de Bakari et s’installa à Balda, profitant des querelles pour s’implanter. Eldridge Mohammadou (1988 :143) souligne cet aspect politique, notant que Hayatou, en plus de la fibre religieuse, profita des rivalités pour étendre son influence, attirant autour de lui des disciples et des partisans.

3.2. Facteur économique

Balda est reconnue pour son économie prospère, ce qui a attiré diverses personnes depuis sa fondation. Cette prospérité a également attiré Modibbo Hayatou au Nord-Cameroun. Une fois installé, Hayatou constata que la région offrait des conditions idéales pour l’agriculture et le paturage. Blama Tchari note que Balda était célèbre pour ses marchés d’esclaves, avec quatre marchés importants: Danki, Balda Gare, Kourdaya et Daifa, ce dernier étant le plus fréquenté et rentable. Les esclaves étaient transportés depuis Djowde[25], près du Nigéria, pour etre revendus à Daifa. Aujourd'hui, ce marché est devenu une ruine, mais son passé en tant que centre d'esclavage a attiré Hayatou. En outre, la présence de la mare « Wehndou mizil »[26], près de mont de Balda, fournissait de l’eau pour l’abreuvage des troupeaux et l’agriculture, rendant la localité encore plus attrayante pour Hayatou[27].

3.3. Facteur militaire

Le facteur militaire occupe une position stratégique comme le souligne Tuan en montrant que:

Les peuples établis en altitude bénéficient d’une position stratégique qui leur permet de surveiller les alentours et de contrôler les voies d’accès cruciales, comme les cols et les passages étroits. Cette hauteur procure également un avantage tactique important, facilitant la défense contre des forces numériquement supérieures, en transformant le terrain en un véritable obstacle pour les envahisseurs (Tuan, 1977).

Le facteur militaire a également joué un rôle décisif dans l’installation de Modibbo Hayatou à Balda. La montagne située derrière Balda offre une défense naturelle contre les attaques ennemies[28]. Bah explique que dans le Soudan occidental, les reliefs et le couvert végétal étaient utilisés pour protéger les populations. Les cavernes, grottes et falaises servaient de refuges et les points dominants du relief permettaient de surveiller les environs (Bah, 1985: 42-43). La montagne de Balda a ainsi constitué un atout stratégique pour Hayatou. Selon Njeuma, lors de la bataille de Balda en 1890, la montagne a aidé les troupes de Hayatou à se retirer face aux forces alliées de Yola, Maroua, Mindif et Bogo, utilisant le terrain pour échapper à l'ennemi (Njeuma, 1978: 165).

La montagne de Balda s'est imposée comme l'un des sites stratégiques majeurs du Nord-Cameroun, jouant un rôle essentiel à plusieurs époques. En particulier, lors des conquêtes peules, elle a servi de point fortifié et de refuge stratégique pour Modibbo Hayatou, contribuant ainsi à la consolidation de son pouvoir et à la défense de ses territoires face aux assauts ennemis. Grâce à sa position géographique et à son relief, Balda a offert un avantage militaire significatif, permettant une surveillance efficace des environs et une défense renforcée, faisant de ce site un atout central dans les stratégies de guerre de l'époque. Cette montagne est à observer sur la photo ci-dessous.

Photo 2: La montagne de Balda

Cliché: Mouhamadou Aminou Mamoudou, Balda le 05 juin 2020

On peut observer la majestueuse montagne de Balda, autrefois un site stratégique clé utilisé par Modibbo Hayatou pour fortifier ses positions lors des conquêtes peules. Située au cœur de paysages contrastés, cette montagne domine une région où l'on remarque, d'un côté, des arbres soigneusement plantés, symbolisant un effort de reboisement ou de préservation, et de l'autre, un vaste étendu aride, témoignant de la rudesse du climat local. Ce contraste saisissant entre végétation et terre desséchée met en relief les défis environnementaux auxquels la région est confrontée, tout en rappelant l'importance historique et stratégique de ce site au fil des siècles. En résumé, les raisons qui ont poussé Modibbo Hayatou à s’installer à Balda sont d’ordre politique, économique et militaire. Ces facteurs ont permis à Hayatou de renforcer la position de Balda et de rayonner au-delà du lamidat de Bogo.

4. L’ÂGE D’OR DE BALDA SOUS MODIBBO HAYATOU

Si Balda est connue comme une localité qui a hébergé Modibbo Hayatou, cependant, grâce à lui, Balda a connu une renommée très importante. L’histoire de ce lawanat est complémentaire avec celle du lamidat de Bogo.

4.1. Rayonnement religieux et attractivité de Balda

Sous l'influence de Modibbo Hayatou, Balda est devenue une localité d'importance régionale, marquant un tournant décisif de son histoire[29]. Modibbo Hayatou a profondément marqué Balda en y instaurant le mahdisme[30], une idéologie religieuse qui a fortement contribué à son rayonnement. Dès son arrivée, Hayatou a mis en place des institutions religieuses et organisé des conférences dans sa mosquée pour diffuser ses enseignements. Il a habilement mobilisé les voies des Malloum, des chérifs, et des savants pour transmettre son message à de nombreux hommes d'esprit religieux. Cette stratégie a attiré à Balda une grande quantité de croyants et d'érudits religieux, renforçant ainsi sa position en tant que centre religieux majeur[31].

Parallèlement, l'immigration des ressortissants du pays haoussa a joué un rôle crucial dans le développement de Balda. Les fils et compagnons de Modibbo Hayatou, tels qu'Ahmadou, Abbas, Maytorare, Mal Alim, et Moza Ilou, ainsi que ses dignitaires comme Mo-Allah-yidi, Mato, Akal, et Chehouwa, ont rejoint Balda et ont contribué à son expansion rapide. La ville est rapidement devenue une bourgade animée, avec un marché toujours fréquenté et un afflux constant de visiteurs[32]. Cette croissance a également été alimentée par l'attrait du mahdisme, qui a attiré de nombreux croyants à Balda.

4.2. Développement et relations politiques de Balda

Le développement de Balda sous Modibbo Hayatou s'est déroulé en trois phases distinctes. Tout d'abord, Hayatou a implanté le mahdisme dans la région, établissant ainsi une base religieuse solide. Ensuite, il a attiré de nombreux étudiants, anciens disciples, et membres de sa famille, ce qui a contribué à faire de Balda un centre intellectuel et religieux important. Enfin, Hayatou a tissé des relations avec les royaumes voisins de Baguirmi et du Bornou, renforçant la position politique et économique de Balda[33].Ce rayonnement régional a été possible grâce à la combinaison de ces éléments. L'implantation du mahdisme a non seulement attiré des croyants, mais a également établi Balda comme un centre de pouvoir religieux. Les relations avec Baguirmi et Bornou ont permis à Balda d'élargir ses influences politiques, tandis que l'immigration haoussa a contribué à son développement économique. En somme, Balda est devenue une ville prospère et influente, dont l'impact s'étend au-delà des frontières du lamidat de Bogo[34].

L’âge d’or de Balda sous Modibbo Hayatou témoigne de la transformation radicale de la localité, passant d’un simple lawanat à un centre régional influent grâce à l’implantation du mahdisme, l’afflux de personnes venues de l’ancien Adamawa et les relations établies avec d’autres entités politiques voisines. Subséquemment, nous explorerons les figures politiques éminentes de Balda en examinant successivement la biographie des Lawan Mouhammadou Oussoumanou, Bouba Oussoumanou et Dahirou Mouhammadou.

5. FIGURES POLITIQUES ÉMINENTES DE BALDA

Il est difficile de parler de Balda sans connaitre la vie de ses leaders qui sont les lawan. Si Balda a connu une ascension fulgurante avec l’avènement de Modibbo Hayatou, elle a également été marquée par des figures politiques éminentes à sa tête.

« En effet, l’histoire se conçoit beaucoup plus comme une connaissance et une conscience du passé à proprement parler. Aux leaders fins et avisés ; la connaissance de l’histoire s’avère nécessaire non pas pour résoudre des problèmes immédiats, mais plutôt pout lui apprécier le présent et préparer le futur. D’autant plus que l’avenir n’est nullement une réalité qu’on découvre cachée quelque part, et moins encore un héritage légué par les aïeux. L’on crée l’avenir par la pensée et l’action. Comme l’histoire contient tout, elle justifie tout » (Lansiné Kaba, 1995:64).

Parmi ces figures, certains sont devenus les lamibe de Bogo. Cette section présente une étude biographique de trois lawan notables: Mouhammadou Oussoumanou, Bouba Oussoumanou et Dahirou Mouhammadou.

5.1. Mouhammadou Oussoumanou

Mouhammadou est née vers 1920 à Bogo[35]. Son père était le feu lamido Oussoumanou de Bogo. Très tôt son père l’amène à l’école coranique dirigée par Modibbo Bakari[36]. Mais la maladie l’empêche de fréquenter. C’est ainsi qu’il ait rapatrié auprès de son père pour entre initié en matière de gestion d’une localité. Très jeune son père le nomme à la tête de lawanat de Balda. Dès son intronisation à Balda, il épouse Maïramou Asmaou qui lui donne trois enfants dont Fadimatou (née vers 1945), Didjatou (née vers 1947), et Dahirou (né vers 1949[37]). Après la mort de son père (lamido Oussoumanou), il devient lamido de Bogo en 1948[38].

Jeune homme, ouvert aux idées modernes, la lamido de Bogo sait parfaitement concilier son commandement coutumier avec son mandat de conseiller à l’Assemblée Territoriale. Il fait montre des grandes qualités humaines dont la manière il s’acquitte de l’une et l’autre de ses charges[39]. Vite il saisit l’occasion et siège aux avant-postes des assemblées locales. Il sera élu à l’ARCAM en 1948, conseillé à l’ATCAM en 1952 puis en 1956, et député à l’Assemblée Nationale du Cameroun en 1960, député fédérale en 1974 date de sa mort. Souffrant depuis des années d’un diabète, il devient de plus en plus affaibli.

« L’être humain n’occupe qu’une portion de l’espace et du temps. Son existence est limitée. Toutes ces actions, y compris les merveilles de sa créativité, la puissance et la gloire sont éphémères à la longue, elles représentent tout un rien dans le temps et l’espace. Comme passent l’orage et l’image des « grands » s’évaporent et s’enent après leur disparition. Dans toutes les affaires humains, y compris la vie elle-même, la durée finit par dégouter » (Sourate 36 cité par Lansiné Kaba, 1995:100).

Ainsi, il décède en le 02 septembre 1974 à l’âge de 51 ans à l’hôpital de Petté[40]. Outre, le lamido Mouhammadou Oussoumanou qui a régné à Balda mais aussi à Bogo, son frère également a été sous ses traces.

5.2. Bouba Oussoumanou

Bouba Oussoumanou est né vers 1927 et devient lawan de Balda en 1948. Issu de la lignée royale, il est le frère cadet du lamido Mouhammadou Oussoumanou. Dès son ascension, il épouse également plusieurs femmes. La nomination de Bouba à la tête de Balda en 1948 par son frère reflète la confiance que ce dernier lui accordait, mais aussi l'importance de maintenir l'autorité familiale sur ce territoire stratégique. Pourtant, les relations entre les deux frères ne tardent pas à se détériorer, engendrant des tensions au sein de la communauté. La gestion du pouvoir à Balda devient une source de conflit, où le jeune lawan se retrouve rapidement en désaccord avec les méthodes et les décisions de son ainé, ce qui va précipiter un tournant décisif dans sa carrière politique[41].

Les dissensions entre Bouba Mouhammadou et son frère Mouhammadou Oussoumanou prennent rapidement de l’ampleur, au point de bouleverser l’équilibre de Balda[42]. Face à ces conflits internes, le lamido décide d'évincer Bouba de son poste de lawan, une décision perçue comme arbitraire par une grande partie de la population. Le lamido Mouhammadou Oussoumanou (son frère cadet) le destitue sans faute grave, et surtout, sans l’accord des habitants de Balda, qui réagissent avec indignation. Cette mesure, jugée injuste et unilatérale, renforce paradoxalement la popularité de Bouba parmi les habitants de Balda. La population, se sentant solidaire avec le lawan déchu, lui apporte un soutien massif, ce qui témoigne de l'adhésion populaire à son leadership. Ce soutien populaire n’échappe pas à l’administration coloniale, qui perçoit en Bouba un potentiel allié capable de garantir la stabilité dans la région malgré les tensions familiales[43].

Suite à son éviction, l’administration coloniale intervient pour éviter une crise politique à Balda. Elle nomme Bouba Mouhammadou Conseiller Adjoint du Maire, tout en lui confiant d’autres responsabilités importantes, telles que son intégration au Conseil d’Administration de la Société Africaine de Prévoyance (SAP)[44]. Ces postes, bien que modestes comparés à celui de lawan, permettent à Bouba de maintenir un certain statut social et économique tout en restant influent au sein de sa communauté. Après la mort de son frère en 1974, Bouba accède finalement au trône de Bogo, entamant un règne de 23 ans marqué par une gestion prudente et une onté de réconcilier les factions locales. Son leadership, qui s'étend de 1974 jusqu'à sa mort en 1997[45], est souvent perçu comme une période de réajustement politique et de stabilisation pour Bogo, où il parvient à consolider son autorité tout en apaisant les tensions héritées de sa rivalité avec son frère[46].

5.3. Dahirou Mouhammadou

Yerima Dahirou Mouhammadou, l'ancien leader de Balda, est né vers 1949[47] à Bogo. Fils du lamido Mouhammadou Oussoumanou et de Mairamou[48], il fut dès son plus jeune âge orienté vers une éducation à la fois religieuse et occidentale par son père, qui voyait en lui un futur dirigeant[49]. Son intelligence était évidente, mais les problèmes de santé l'obligèrent à interrompre précocement ses études. Enfant, Yerima Dahirou nourrissait déjà de grandes ambitions, rêvant de suivre les pas de son père en devenant lamido. Il exprimait fréquemment ce désir devant les princes, déclarant avec conviction. Ce rêve de royauté, partagé avec ses camarades de jeu dans la cour royale de Bogo, illustre son aspiration profonde à occuper un jour une position de pouvoir.

Yerima Dahirou se maria avec plusieurs femmes selon le principe islamique, dont Mamma, Doudou, et Asta Djouldé, ce qui témoigne de son statut social élevé et de son intégration dans les réseaux familiaux influents de la région. Sa nomination comme lawan de Balda le 19 octobre 1970 marque un tournant décisif dans sa vie, confirmant son destin de leader. Cette désignation n’était pas seulement le fruit de sa filiation, mais aussi de ses qualités personnelles et de son engagement à préserver et perpétuer l’héritage familial. Yerima Dahirou[50] a su utiliser les leçons apprises de son père et de son éducation pour naviguer dans les complexités politiques de Balda, tout en honorant les traditions et en respectant les attentes de sa communauté[51]. L’ascension de Yerima Dahirou à la tête de Balda est un exemple frappant de la manière dont les rêves d'enfance peuvent se transformer en réalité, lorsqu'ils sont soutenus par une onté inébranlable et par l'appui de sa communauté. Son parcours, jalonné d’obstacles qu il a su surmonter, en fait un dirigeant respecté et une figure clé dans l’histoire récente de Balda[52]. La continuité de son règne témoigne non seulement de son autorité, mais aussi de sa capacité à incarner l'héritage de son père tout en apportant sa propre vision à la gestion[53] de Balda[54].

CONCLUSION

En somme, l’analyse de Balda en tant que lawanat stratégique du lamidat de Bogo révèle l’importance irréfutable de cette localité dans les dynamiques politiques et économiques du Nord-Cameroun. À travers son histoire, Balda s’est affirmé comme un point stratégique dans la conquête du trône de Bogo, bénéficiant d’une position stratégique qui a façonné ses interactions politiques et économiques. L’impact de l’arrivée de Modibbo Hayatou a consolidé cette importance, transformant Balda en une terre d’accueil et de développement, influençant ainsi le paysage régional. Les résultats de cette étude montrent que la place de Balda dans le lamidat de Bogo est le fruit d’une combinaison complexe de facteurs politiques, économiques et géographiques. Subséquemment, cette étude sur le lawanat de Balda permet de connaître les échanges entre le pouvoir local et régional est inévitable. C’est le cas entre ce lawanat et le lamidat de Bogo dont Balda en est la subordonnée. Cette réflexion offre une réflexion pour les investigations à venir dans le but de cerner le rapport entre l’histoire, le pouvoir et le développement dans une cadre des chefferies traditionnelles au Nord-Cameroun. Pour cela, une piste de recherche essentielle pour les études futures serait d’explorer les dynamiques du pouvoir et le développement des entités traditionnelles, tout en mettant l’accent sur le lawanat de Balda et le lamidat de Bogo. Cette investigation permettra aux générations futures se de concentrer sur la dynamique des interactions entre le pouvoir local et les autorités régionales, tout en examinant comment ces interactions façonnent la politique de développement et influencent la mobilisation des ressources.


 

Références Bibliographiques

Sources Orales

Noms et prénoms

Fonction

Dates et lieu d’entretien

1

Adama Oumara

Iman prédicateur de

Balda le 9 mars 2018

2

Adji Gadjama

Ex-colonel de l’armée

Yaoundé le 6 aôut 2018

3

Alioum Dahirou

Cultivateur

Balda le 14 juin 2018

4

Blama Tchari †

Ex-DG de MIDIMA (Mission de développement intègre des monts Mandara).

Maroua le 19 mai 2019

5

Dahirou Mouhammadou †

Lawan de Balda

Balda le 1er juin 2018 à 10h22.

6

Haman Djam

Iman prédicateur

Maroua le 12 octobre 2017.

7

Toukour

Notable

Bogo le 12 janvier 2018


Sources Archivistiques

1.      APM: Arrêté portant sur le canton de Balda pour la nomination des djaouro, 2005

2.      ARM: Arrêté ministériel N°176/VPM/INT/1 portant homologation de la désignation du lawanat de Balda, 19/10/1970.

3.      ARM: Situation sur les trois lawanat du lamidat de Bogo, dont Balda, Madaka et Ouro-Messere, Maroua, le 16 novembre 1968.

4.      APB: Bloc note du Yerima Bouba Oussoumanou, 12 mai 1985

5.      ARM: Rapport de Mr Menez, Adjoint au chef de subdivision de Maroua sur le lawanat de Balda, Lamidat de Bogo. Tournée du 22 au 28 juin 1954.

6.      ARM: Cf./30/CF/DDI, Comportement de Yerima Bouba, lawane de Balda vers le lamidat de Bogo Ier mars 1965.

7.      APB: Bloc note de lamido Bouba Oussoumanou sur le rapport florissant de la récolte du mil dans le lawanat de Balda entre 1964 et 1965.

8.      ARM: N°78/L/CF/DDI/22 juin 1970 rédigé par Maïdadi Sadou à Balda à 14h25.

9.      ARM: Bulletin de note 1947.

10.  ARM: Notes de Mr J. Roy chef de subdivision de Maroua le 04 Juin 1956.

11.  ARM: Acte de décès N°2. Maroua, le 10 septembre 1973.

12.  ARM: Bulletin de note 1957.

13.  ARM: Situation sur les trois lawanat du lamidat de Bogo, dont Balda, Madaka et


Ouro-Messere, Maroua, le 16 novembre 1968.

14.  ASB: Bulletin de Note, 1956.

15.  ARM: Arrêté ministériel N°176/VPM/INT/1 portant homologation de la désignation du lawan de Balda.

16.  BUCREF, 2010: recensement général de la population et de l’habitat du Cameroun.

Sources Écrites

1.      Bah, T. M., (1985), Architecture militaire traditionnelle et poliorcétique dans le Soudan Occidental: XVIIe à la fin du XIXe siècle, Yaoundé, CLE/ACCT.

2.      Bah, T. M. et al., (1998), Acteurs de l’histoire politique au nord-Cameroun XIX et XXe siècle, Ngaoundéré-Anthropos, III, Numéro spécial.

3.      Charara Y, (2011), La communauté éducative de l’école de Madaka, Cameroun. Mémoire de Maîtrise en Education, Université du Québec.

4.      Eldridge M., (1976) Les Peuls férôbé de Diamaré, Maroua et Petté. Tokyo, ILCCA,

5.      Eldridge M., (1988), Les lamidats de Diamaré et du Mayo-Louti. Tokyo, ILCAA,

6.      Mouhamadou. A. M., (2019), La diplomatie traditionnelle entre les lamidats de Maroua, Mindif et Bogo du XVIIIe au XXIe siècle, Mémoire de Master en Histoire, Université de Maroua.

7.      Njeuma, M. Z., (1978), Hegemony Fulani in Yola, Yaoundé.

8.      Njeuma, M. Z., (1989), Histoire du Cameroun (XIXe au début du XXe), Paris, L’Harmattan.

9.      Ostrom, E., (1990), Governing the Commons: The Eution of Institutions for Collective Action, Cambridge University Press.

10.  Seignobos et Tourneux., Atlas de la province de l’Extrême-Nord. 2002.

11.  Tuan, Y-F., (1977), Space and place: the perspective of experience, University of Minnesota.


 



[1] Est un commandement placé sous l’autorité d’un lamido

[2] Plus de la majorité des lamibe de Bogo ont été les lawan de Balda. La preuve est que les quatre lamibe (Bakari, Oussoumanou, Mouhammadou et Bouba) qu’ait connus Bogo ont tous été à la tête de ce lawanat.             

[3] À cause de l’installation de modibbo Hayatou dans ce lawanat.

[4] BUCREF, 2010: recensement général de la population et de l’habitat du Cameroun.

[5] Propos recueilli auprès d’Adama Oumara, Imam de la mosquée centrale de Balda et officie comme Alkali dans la cour du lawanat de Balda.

[6] Entretien avec Adji Gadjama, l’ancien colonel de l’armée camerounaise. Sa mère est de l’ethnie Zoumaya.

[7] Propos de Dahirou Mouhammadou recueillis qui est le lawan de Balda depuis 1970 jusqu’à l’ère actuel. Balda le 1er juin 2020 au quartier Balda Gâré à 10h22.

[8] Entretien le 02 juin 2020 à Balda avec le prince Alioum Dahirou, fils de l’actuel lawan de Balda, Dahirou Mohammadou

[9] Recueil tiré de l’émission Archive d’Afrique présenté par le journaliste camerounais Alain Foka à la Radio France Internationale (RFI) chaque samedi à 8h TU et 22h20 TU vers toutes cibles.

[10] Un arbre d’origine indien qui pousse dans le milieu tropical.

[11] Excepté Bello qui a été également un prince influent mais accédant au trône en étant le lawan de Guinlay et non de Balda.

[12] APM: Arrêté portant sur le canton de Balda pour la nomination des djaouro, 2005.

[13] APM: Arrêté portant sur le canton de Balda pour la nomination des djaouro, 2005.

[14] Seul Oudjiri qui n’a pas passé par Balda pour conquérir Bogo, mais tous les auteurs dirigeants ont des liens forts avec Balda.

[15] ARM: Arrêté ministériel N°176/VPM/INT/1 portant homologation de la désignation du lawanat de Balda, 19/10/1970.

[16] ARM: Situation sur les trois lawanat du lamidat de Bogo, dont Balda, Madaka et Ouro-Messere, Maroua, le 16 novembre 1968.

[17] Propos de Dahirou Mouhammadou recueillis qui est le lawan de Balda depuis 1970 jusqu’à l’ère actuel. Balda le 1er juin 2020 au quartier Balda-Gâre à 10h22.

[18] Archives privées du lamidat de Bogo: Bloc de note du Yerima Bouba Oussoumanou, 1984.

[19] ARM: Rapport de Mr Menez, Adjoint au chef de subdivision de Maroua sur le lawanat de Balda, Lamidat de Bogo. Tournée du 22 au 28 juin 1954.

[20] ARM: Cf./30/CF/DDI, Comportement de Yerima Bouba, lawane de Balda vers le lamidat de Bogo 1er mars 1965.

[21] Entretien le 02 juin 2020 à Balda avec le prince Alioum Dahirou, fils de l’actuel lawan de Balda, Dahirou Mohammadou.

[22] Archives privées de Balda: Bloc note de lamido Bouba Oussoumanou sur le rapport florissant de la récolte du mil dans le lawanat de Balda entre 1964 et 1965.

[23] Les Peuls sont traditionnellement des nomades, cherchant des paturages pour leurs troupeaux, ce qui est leur spécificité la plus connue. Cette caractéristique a été soulignée par Eldridge Mohammadou (1976 ; 1988) dans ses travaux. Toutefois, pour Modibbo Hayatou, les raisons de son installation à Balda ne sont pas simplement liées à la recherche de paturages. Il est essentiel d'examiner les facteurs politiques, économiques et religieux qui ont motivé son choix de s'installer à Balda.

[24] Pour plus de précision voir Machiavel, Le Prince.

[25] C’est un quartier situé au nord du lawanat de Balda, derrière la montagne et une marre appelé « Wehndou Mizil » sont au centre de ces deux localités.

[26] Elle continue de faire la fierté de la population de Balda.

[27] L’informateur a souhaité rester anonyme pour des raisons de sécurité.

[28] Information recueillie auprès de Blama Tchari, le chef du quartier Siratare à Balda. Ce dernier est le directeur général actuel de MIDIMA (Mission de développement intègre des monts Mandara).

 

[29] Quand Modibbo Hayatou arrive à Bogo s’installe à Balda. Le lawan Bakari l’a suit par l’intermédiaire du lamido de Maroua Mouhamman Sali, mais sans le rencontrer face à face.

[30] Mouvement religieux et politique qui s’appuie sur la figure d’un homme plus précisément le Mahdi.

[31] Ibid.

[32] Information rapportée par Adama Oumara l’imam de la mosquée centrale de Balda. Celui-ci nous relate que son arrière-grand-père avait participé à cette bataille de Balda à côté du Modibbo Hayatou dont il était un fervent disciple.

[33]Ibid.

[34] Information recueillie auprès de Blama Tchari, le chef du quartier Siratare à Balda. Ce dernier est le directeur général actuel de MIDIMA (Mission de développement intègre des monts Mandara).

[35] ARM: Bulletin de note 1947.

[36] C’est un érudit peul originaire de Sokoto dans le Nord-Est du Nigéria installé à Bogo vers 1895.

[37] ARM: Bulletin de note 1947.

[38] Ibid.

[39] ARM: Notes de Mr J. Roy chef de subdivision de Maroua le 04 Juin 1956.

[40] ARM: Acte de décès N°2. Maroua, le 10 septembre 1974.

[41] ARM: Situation sur les trois lawanat du lamidat de Bogo, dont Balda, Madaka et Ouro-Messere, Maroua, le 16 novembre 1968.

[42] ARM: Situation sur les trois lawanat du lamidat de Bogo, dont Balda, Madaka et Ouro-Messere, Maroua, le 16 novembre 1968.

[43] Archives de la Sous-préfecture de Bogo: Bulletin de Note

[44] ARM: Arrêté ministériel N°176/VPM/INT/1 portant homologation de la désignation du lawan de Balda.

[45] Ibid.

[46] Ibid.

[47] ARM: Bulletin de note 1947.

[48] D’autres sources également disent qu’on l’appelle Asmaou.

[49] C’est la tradition dans tous les cercles du pouvoir. Un chef doit toujours veiller à son premier fils, qu’il considère toujours comme son digne successeur. Ainsi, Le jeune prince Dahirou a également reçu cette affection de son père, le feu lamido Mouhammadou Oussoumanou.

[50] Il est l’homonyme du lamido Yaya Dahirou. Le Lamido Yaya Dahirou de Maroua (1943-1958) est une figure emblématique de l’histoire coloniale dans le Nord-Cameroun, ayant joué un rôle central pendant la période coloniale française dans la ville de Maroua. Successeur d'une longue lignée de chefs traditionnels, il a su naviguer entre les intérêts des colons français et les aspirations de son peuple. Au cours de son règne, qui coïncide avec l'administration coloniale, il a contribué à maintenir la stabilité dans la région en collaborant avec les autorités françaises, tout en préservant une certaine autonomie culturelle pour son peuple. L'une de ses actions les plus notables fut son rôle de médiateur entre les colons et les populations locales. Il a œuvré pour apaiser les tensions, tout en garantissant que les lois coloniales soient adaptées aux réalités locales, notamment en ce qui concerne la gestion des terres et la collecte d'impôts. Le Lamido Yaya Dahirou a également été un vecteur de modernisation dans la ville de Maroua, en soutenant la construction d’infrastructures telles que des routes, des écoles et des centres de santé, tout en restant fidèle aux traditions islamiques et coutumières. Sous son règne, Maroua s'est progressivement transformée en un centre administratif important pour les français, tout en devenant un lieu de convergence pour les échanges commerciaux et culturels dans le Nord du Cameroun. En dépit des pressions coloniales, le Lamido Yaya Dahirou a su défendre les intérêts de son peuple, assurant ainsi que les traditions locales et islamiques soient respectées dans la mesure du possible sous l'administration française. Son leadership et son habileté politique ont fait de lui un acteur clé de la période coloniale dans cette région.

[51] L’informateur a souhaité rester anonyme pour des raisons de sécurité.

[52] À cause de sa connaissance en matière de gestion de la cité, il est consulté par tous les lawan et lamibe de Bogo dans le domaine politique et économique. Malgré les rivalités existantes entre Dahirou et les autres princes de Bogo, pourtant, il est toujours le premier à être sollicité par les lamibe Bouba Oussoumanou et Ahmadou Oussoumanou.

[53] Un chef travailleur joue un rôle central dans la gestion de sa cité. En étant engagé dans des projets communautaires, il incarne l’autorité et la responsabilité qui reposent sur lui pour améliorer les conditions de vie de ses administrés. Un chef actif et visionnaire est à l’origine des initiatives économiques locales, notamment dans l’agriculture, l’éducation, et les infrastructures de santé. Par son exemple acharné, il inspire non seulement les membres de sa communauté, mais aussi établit un cadre propice à la coopération et à l’entraide. Ce rôle de guide économique et social est fondamental pour le développement durable d’une cité.

[54] Ibid.

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